Le 5S informatique
“Encore un article sur le 5S! Mais pourquoi?” vous demandez-vous.
Très bonne question! Nous avons en effet déjà publié un article sur le 5S et réalisé un petit rappel dans nos almanachs 2022.
“Alors, c’est quoi leur problème avec les bureaux mal rangés?” vous exclamez-vous!
Eh bien c’est justement un problème que nous rencontrons au quotidien, à l’Atelier. Contrairement aux apparences, nous luttons chaque jour avec plus ou moins de succès contre l’envie irrésistible de “poser des choses, là, en attendant de leur trouver une place”.
Or, nous l’avons déjà évoqué:
Aussi bordélique soit-on, il est toujours appréciable d’évoluer dans un environnement où la vue est dégagée et les outils de travail facilement accessibles. D’ailleurs, ne ressent-on pas une certaine légèreté (teintée de fierté personnelle) après une session de rangement rondement menée?
Bien sûr, certains (encore probablement dans le déni), brandiront cette célèbre citation attribuée à Einstein: “Si la vue d’un bureau encombré évoque un esprit encombré, alors que penser d’un esprit vide?” Argument qui gratte un peu l’égo et qui pourrait nous faire sombrer du côté obscur, si l’on oublie un élément essentiel: n’en déplaise aux plus créatifs et désorganisés d’entre nous, nous ne sommes (mal)heureusement pas tous Einstein! Pour le commun des mortels, un bureau encombré est souvent un frein à la productivité…
Et plus on est nombreux, plus il est vital d’entretenir l’espace de travail partagé, pour le bien-être de tous (oui, pour nous, trouver un dossier en moins de 5 minutes sans avoir envie de retourner le bureau ou de faire manger les classeurs de formation à sa collègue est un facteur de bien-être au travail).
D’accord, d’accord, mais il y a un déjà un excellent article sur le 5S… Alors pourquoi on en reparle? Tout simplement parce que ranger son bureau c’est bien, mais c’est la partie émergée de l’iceberg.
Eh oui, s’il n’y a eu qu’une chose positive au covid (elle était facile, on sait), c’est l’accélération des changements de modes de travail.
Tout plein de nouvelles pratiques digitales ont vu le jour, qui permettent de virtualiser son espace de travail. Et avec celui-ci, tout son bazar.
Alors certes, votre tasse de café ne traine pas une semaine sur votre espace partagé en ligne et vos fichiers sont accessibles en deux clics grâce aux outils de recherche intégrés. Mais… avez-vous seulement idée de la quantité de données que vous avez stocké dans vos espaces virtuels? Toutes les données enregistrées dans le “cloud”, tous les logiciels en mode SAAS et autres applications WEB s’appuient sur des serveurs bien réels. Ceux-ci sont consommateurs d’énergie, leur fabrication et leur fonctionnement contribue aux émissions de CO2, et surtout ils prennent une place physique de plus en plus considérable. Autrement dit, on construit des “maisons” pour stocker nos données dans des espaces qui pourraient être utiles à d’autres usages. Et puis des équipements qui sont ralentis par le nombre de données à traiter, voire saturés, ce sont des équipements que vous finissez par remplacer.
Sans compter les milliers de litres d’eau douce utilisés et pollués notamment lors de l’extraction des métaux.
Alors, prêts à donner une deuxième jeunesse à vos appareils?
* Infos issues de la fresque du numérique. Si vous êtes intéressés par le sujet, participez aux ateliers proposés par l’association Hop’la transition.
… tout en améliorant ses conditions de travail?
Cela tient en un mot tout simple, dont les amateurs d’écologie sont friands en général: S O B R I E T E
Le fait de ne pas voir les quantités de données stockées ne nous incite pas à la mesure, mais pourtant, la première chose à faire pour limiter le bazar dématérialisé est un tri à la source. Avez-vous déjà archivé un mail en vous disant “on sait jamais, un jour j’en aurai besoin” pour au final ne jamais parvenir à le retrouver le moment venu? Cela nous arrive à tous!
On stocke des quantités d’informations démentielles, dont on sait pertinemment qu’il n’y a aucun intérêt à les conserver. A part à se rassurer, mais de quoi? La première action consiste donc à ne garder que l’essentiel: les contrats et les données qui requièrent des temps d’archivage définis, les mails dont le contenu est important (pour vous, par pour votre collègue qui est en copie et qui va lui aussi garder ce mail). Posez-vous les questions suivantes :
Les informations présentes dans ce mail sont-elles disponibles ailleurs?
Quel est le risque si je le supprime?
Vous verrez que vous pouvez facilement supprimer 90% de votre boite de réception, sans aucun remord…
Ordinateur fixe ou portable, smartphone, tablette: faites du ménage partout! Tous les dossiers qui ne nécessitent pas d’être conservés pour des raisons réglementaires doivent être sur la sellette. A chaque fois demandez-vous ce que cela vous apporte de conserver tel ou tel document et surtout quel est le risque si vous le supprimez. Faites attention à ne pas tomber dans le piège de la vieille boite à souvenir du grenier: on ouvre un dossier pour faire le tri et on se retrouve à tenir la jambe aux stagiaires avec des récits nostalgiques du temps passé. C’est sympa mais pas du tout efficace! Pour cette étape, restez focus et utilisez les fonctionnalités de nettoyage de vos appareils pour vous aider. Vous pouvez par exemple filtrer les documents ou mails qui n’ont pas été ouverts depuis plus de X temps. Pensez aussi à supprimer les applications et logiciels inutilisés qui peuvent ralentir votre système.
Une fois tous ces documents obsolètes supprimés, vous devriez avoir dégagé assez de place pour sentir les effets bénéfiques sur vos appareils, mais aussi sur votre fonctionnement. Des dossiers moins chargés, ce sont des données plus accessibles. Pour faciliter encore leur utilisation, il est temps de mettre en place un classement efficace.
📁 Créez des dossiers et ordonnez les documents et mails restant selon une logique compréhensible et applicable par tous. Votre activité est très répétitive? Réalisez une arborescence standard que votre équipe pourra recopier à chaque nouveau client par exemple. Déterminez ensemble les règles du jeu pour que chacun s’y retrouve et que la recherche d’un document ne relève pas du casse-tête niveau expert.
📧 Si vous avez décidé de conserver certains mails, la question est de savoir à qui ils seront utiles pour déterminer le lieu de stockage le plus approprié. Si les données doivent être partagées, utilisez une adresse mail générique par exemple, ou bien enregistrez les mails vraiment importants dans un dossier partagé. Et pourquoi pas utiliser la même arborescence dans vos dossiers mails que dans votre base de données?
Ensuite, il faut réduire la quantité de données entrantes: faites le point sur les mails reçus, les newsletter auxquelles vous êtes abonné. Si vous n’avez jamais le temps de lire les actualités reçues, désabonnez-vous, ça réduira aussi votre charge mentale! Et si vous avez peur de passer à côté de LA bonne affaire que seuls les abonnés reçoivent par mail à chaque pleine lune, remémorez-vous la dernière fois que vous avez profité d’une telle promo… Vous n’avez jamais eu l’occasion d’en profiter? Alors pas de scrupule, on se désabonne!
Le fait d’agir directement à la source des mails reçus vous permet de gagner sur tous les tableaux: moins de temps perdu à ouvrir des mails que vous ne lirez pas, moins de charge mentale avec une boite de réception qui ne comporte que l’essentiel et moins d’espace de stockage nécessaire pour toutes ces données.
Si c’est votre activité qui génère beaucoup d’échanges par mail, posez-vous les questions suivantes:
Certaines informations peuvent-elles être transmises lors d’une réunion ou à l’oral?
Les documents en pièce jointe peuvent-ils être remplacés par des liens vers un dossier partagé?
La taille des documents peut-elle être réduite avant partage?
La mise en place de routines de communication réduirait-elle l’envoi de mails?
Que ce soit au sein de votre équipe ou avec vos clients, ouvrez le débat : eux aussi ont peut-être envie de réduire le nombre de mails échangés?
Pour que votre système de classement fonctionne, il faut qu’il soit clair et transparent pour tous les utilisateurs.
Identifiez tous les appareils et tous les espaces de stockage de données au sein de votre organisation et travaillez à leur optimisation. On dit que la nature a horreur du vide, eh bien vos collaborateurs aussi! Plus vous donnerez d’opportunité de stocker des données, plus ce sera le cas. Réduisez au maximum les bases de données partagées, mettez en place des règles d’utilisation et surtout soyez exemplaire et exigeant. Il y aura forcément un moment où votre collègue Marina enregistrera un document non identifié “juste 1 journée, le temps que la mise à jour se fasse“, en plein milieu de votre belle arborescence. Si vous n’y prenez pas garde, le fichier restera 6 mois et en plus les autres collègues se diront que “ah ben moi aussi je vais poser un fichier là puisque Marina l’a fait et qu’on lui a rien dit“. Et en moins d’un an vos dossiers auront disparu parmi une liste sans fin de documents dont plus personne ne sait dire ce qu’ils contiennent.
Attention cependant à ne pas tomber dans l’excès: pas la peine de virer Marina pour son écart, un simple rappel de règles devrait suffire à remettre de l’ordre.
✅ Mettez en place des règles simples à appliquer. Si vous choisissez une arborescence à 10 niveaux, il y a de fortes chances que vos collaborateurs finissent en burnout avant d’avoir trouvé le bon dossier! Le plus efficace est d’impliquer toute l’équipe dans la démarche, non seulement parce qu’on est plus intelligent à plusieurs mais aussi parce que les idées du groupe seront plus faciles à appliquer par ceux qui les ont cocréées.
“La perfection est atteinte non pas lorsqu’il n’y a plus rien à ajouter, mais lorsqu’il n’y a plus rien à retirer” Antoine de St-Exupéry
Et retirer suffisamment pour devenir parfait cela prend du temps. D’autant que de nouvelles données apparaissent chaque jour. Soyez indulgent avec vous-même et fixez vous des objectifs atteignables. Comme pour les régimes, il faut être réaliste! Si vous avez l’habitude de manger 2000 calories à chaque repas, le fait de changer votre menu pour une salade sans vinaigrette ne contribuera qu’à vous dégoûter.
Pour ne pas terminer sur le banc des aigris du 5S, procédez par petits pas!
Votre organisation stocke des données dans 6 bases différentes? Essayez déjà d’en regrouper deux ou trois.
Vous êtes abonné à 10 newsletter sur la gestion d’entreprise? Supprimez la moitié des abonnements et observez si vous parvenez à lire les 5 newsletters restantes avant d’aller plus loin.
La clé du 5S réside dans la régularité et la discipline qu’on y met. Si ce n’est vraiment pas votre fort de mettre en place des règles et de les respecter, essayez de nommer un référent en interne qui sera en charge de lancer régulièrement quelques actions pour maintenir à jour vos standards et les faire respecter.
Attention
L’idée n’est pas de se débarrasser du sujet mais de le confier à une personne à l’aise avec les règles de fonctionnement. Chacun a sa part à jouer, le référent n’est là que pour donner une dynamique. Pour l’aider, mettez en place un rendez-vous fixe (à une fréquence raisonnable pour vous! On le sait que vous n’irez pas à la salle de sport, pas plus que vous ne trierez vos mails une fois par semaine!
) et invitez toute l’équipe pour une action collective de nettoyage des données. Et si, comme nous, vous fonctionnez à la récompense, vous pouvez mettre en place des indicateurs de suivi (X Mo disponibles sur le disque, X mails dans la boite de réception) et célébrer lorsque vous passez des caps définis. 🥳
Pour résumer, le 5S informatique vous permettra:
De gagner en efficacité (moins de temps à chercher des documents)
D’améliorer les conditions de travail (moins d’envie de jeter l’ordinateur par la fenêtre parce qu’il rame ou d’assommer son collègue à coup de souris parce qu’il a écrasé sans faire exprès votre fichier en nommant le sien à l’identique)
De réduire votre impact sur la planète en prolongeant la durée de vie de vos équipements et en évitant la construction de centres de données inutiles.
Pour le mettre en place, une règle simple: pensez S comme… Sobriété!